dimanche 19 décembre 2021

 Excellente émission de 2 heures          

Le vétérinaire médiatisé, Cyril HUE, (vétérinaire au Centre de Recherche sur les Mammifères marins de La Rochelle puis au Zoo de La Flèche depuis 21 ans) en discussion avec le médium David SABAT.

                                                               




vendredi 17 décembre 2021

        LA  COMMUNICATION  ANIMALE  INTUITIVE     

                                    Enjeux sociétaux                                                                               


    Du rôle social de la CAI au livre de Fabienne Maillefer,
« Accompagner les animaux en fin de vie » (Editions Véga - 2021)

 

Le grand public connaît l’éthologie, le comportementalisme et la médecine vétérinaire, mais il s’ouvre depuis quelques décennies à d’autres façons, subtiles et non mentales, d’envisager la relation animal-humain. En une quarantaine d’années, la communication animale intuitive (CAI), également appelée communication inter-espèces, explose et retrouve ses lettres de noblesse. Je dis bien « re »trouve car il s’agit d’une reliance hors d’âge et intemporelle entre l’homme et l’animal, qui fut mise au second plan par les aléas de l’Histoire occidentale, notamment les guerres successives, le cartésianisme triomphant, l’intellectualisme des Lumières puis l’industrialisation exacerbée de la modernité.

Une forme singulière de communication avec l’âme animale émerge grâce à cette discipline accessible à tous. Incontestablement, et même si beaucoup de travail d’information reste à faire, la communication animale intuitive impacte les personnes appelées par son enseignement, elle touche tous les milieux sociaux. Si les femmes s’intéressent massivement à la CAI, les hommes y sont aujourd’hui de plus en plus présents ; quant aux vétérinaires, certains se forment à cette pratique puis l’exercent dans le cadre de leur profession, officiellement ou officieusement.

La communication animale intuitive fut parfois appréhendée, par les observateurs sociaux, comme une mode éphémère ou bien comme le signe de la montée d’un irrationalisme de masse à la solde de quelques figures de la cause animale et du végétarisme… Mais il n’en est rien ! Cette analyse est superficielle et erronée, il convient d’aller plus en profondeur si l’on veut comprendre la raison d’être, la fonction sociale et l’enjeu de cette discipline émergente.

En réalité, le succès de la communication animale intuitive est pérenne et ne se dément pas. Année après année, elle occupe le terrain sous forme de conférences, de stages, d’ouvrages, d’émissions radio ou télévisuelle, d’écoles, de formations, de partenariats avec des zoos ou haras, d’entreprises ou sociétés s’érigeant autour de ce concept animalier, etc. La CAI n’est donc pas une mode éphémère, elle est plutôt l’indicateur d’un changement des mentalités, des comportements et des projections. Elle est un signe des temps indiquant qu’un déplacement du champ de conscience est à l’œuvre, tant à l’échelle de la conscience individuelle que collective.

Mais qu’est-ce qui se déplace ? Qu’est-ce qui change ? Principalement notre positionnement anthropocentrique, c’est-à-dire le fait de voir l’humain comme l'entité centrale la plus significative de l'Univers. Selon cette conception anthropocentrique largement entretenue ces derniers siècles, la Nature n’est jamais appréhendée comme un partenaire avec lequel nous sommes potentiellement en résonance, mais comme une ressource naturelle à disposition : elle est ce qu’on lui prend, tant en matière de minéraux, de végétaux que d’animaux... Point à la ligne ! Cette exploitation de la Nature, au dessus de laquelle se trouve l’homme, perdure jusqu’à ce qu’émerge une autre façon de voir le monde, la planète. Dans ce monde renaissant, l’humain commence doucement à concéder quelques droits à la Nature et, par cet acte, il relativise sa position centrale. Que se passe-t-il ?

D’une part, l’humain s’envisage désormais comme un être vivant faisant partie d’un environnement également vivant, voire intelligent. D’autre part, il devient le sujet d’interactions avec d’autres espèces et/ou formes conscientes : ces interactions pouvant être sensorielles ou extrasensorielles, visibles ou non. Nous commençons scientifiquement à admettre que l’humain interagit avec les minéraux, les végétaux, les animaux et même des formes de conscience non humaines dont nous ne comprenons pas grand-chose à ce jour.

 

L’intelligence du coeur aidée de l’intelligence mentale du cerveau (le coeur est pourvu de récepteurs et neurotransmetteurs et s’établit un dialogue constant entre les fibres nerveuses du coeur et certaines structures cérébrales), font entrevoir l’idée que notre espèce pourrait bien n’être au centre de rien, même si cela blesse notre ego qui, lui, entre en résistance face à cette réalité ! Ni supérieure ou inférieure à d’autres espèces, se pourrait-il que la nôtre soit tout simplement en interaction avec multiples espèces en amont et en aval d’elle-même, telle une chaîne où chacun joue son rôle, mais où aucun n’est plus important que l’autre ? Cette question met à mal la vision pyramidale, selon laquelle la hiérarchie et les niveaux de pouvoir sont la règle. Si cette règle demeure, puisqu’elle structure l’organisation de nos sociétés, elle pourrait bien être aussi un leurre primitif entretenu depuis des lustres par nos cultures, au bénéfice de quelques-uns.

 

Dans ce contexte de modification de l’angle de vue, la CAI m’apparaît comme un indicateur très significatif de ce déplacement de la conscience, mais elle n’est pas la seule. Je pense notamment à l’ufologie (les phénomènes ovnis) ; il n’est pas anodin que la CAI rencontre un succès grandissant auprès des populations pratiquement au même moment où l’ufologie se popularise, au moment où l’on voit ses associations se démultiplier à travers le monde et exercer des pressions, alors que leurs deux objets d’étude n’ont évidemment rien à voir a priori !

Selon une perspective sociologique que je soutiens depuis des années, ces deux disciplines m’apparaissent comme deux puissants indicateurs sociaux du déclin de l’anthropocentrisme, voire deux leviers majeurs de son déclin : d’un côté, une partie de l’humanité prend conscience de sa résonance et de sa connexion d’âme (non locale) avec l’animal, de l’autre, l’humanité témoigne et montre que d’Autres consciences, échappant à la localité de l’espace et du temps, interagissent et communiquent avec nous. Il y a donc une dynamique commune, profondément initiatique, s’incarnant autour de deux thèmes différents. La CAI a attiré massivement les femmes au début, tandis que l’ufologie était très majoritairement constituée d’hommes au départ, mais dans les deux cas ces disciplines se positionnent intellectuellement, pratiquement et intuitivement, aux antipodes de l’anthropocentrisme.


Une transformation du lien que nous tissons avec la Nature est à l’œuvre dans nos sociétés. Les personnes ayant pris le temps de s’informer des théories et pratiques de la CAI et du rôle qu’elle joue déjà auprès de certains acteurs sociaux (propriétaires d’animaux, haras, zoos, vétérinaires, cirques, etc.), savent bien que son développement n’a rien à voir avec un irrationalisme de masse, mais avec un changement de paradigme et d’angle de vue. Changer de paradigme, c’est changer de modèle de société et de représentation du monde, à l’extérieur comme à l’intérieur de soi ; c’est aussi modifier la perception que nous avons de la vie et de la mort.

Avec ou sans le consentement des institutions, via diverses formes d’engagements, la personne exprime actuellement son désir d’intégrer autrement l’animal dans les affaires de la Cité. Celui-ci n’est pas simplement un objet dont on dispose comme on veut, mais un être vivant conscient, aimant, souffrant, ayant des émotions, un être soumis comme chacun d’entre nous à la naissance et au trépas, un être spirituel aussi.

Or, pour que cette compréhension de l’animal entre pleinement dans la Cité des hommes et dans leur vie quotidienne, pour que l’animal, quel qu’il soit, domestique ou sauvage, puisse y vivre et y mourir dans une plus grande dignité et pour que l’humain sache comment cohabiter avec lui, il est besoin de personnes capables de nous parler de l’âme animale. Nous avons fort heureusement des interprètes animaliers proposant au grand public des ouvrages sérieux et complets, bâtis sur des années d’expérience, comme celui-ci : « Accompagner son animal en fin de vie », qui est une clé d’entrée dans l’espace sacré de la cohabitation animal-humain. Cet ouvrage de Fabienne Maillefer est ce qui se fait de mieux en matière pédagogique. Elle dévoile, étape après étape, la façon de s’y prendre lorsque notre animal quitte ce monde, alors que nous sommes submergés par l’émotion, très fragilisés par la situation et tentés d’aller trouver à l’extérieur de nous une solution « clé en main ».

Son expérience personnelle ainsi que sa formation professionnelle autour de l’accompagnement de fin de vie, tant humain qu’animal, associées à une écriture simple, font de cet ouvrage un outil de référence où se mêlent au fil des pages bienveillance et rigueur. Ce livre instructif est incontournable pour toute personne souhaitant comprendre ce qui se joue autour de la vie et de la mort d’un animal, pour celui ou celle qui veut se rapprocher de ce dernier, préparer son grand départ vers une autre dimension et accueillir en soi ce deuil prévisible. Pédagogie, méthode, empathie, déontologie et spiritualité font bon ménage dans cet ouvrage, ce qui n’est pas une mince affaire pour un auteur… Cocktail réussi, si je puis dire !

Tel un guide, à la fois pratique et sensible, enrichi de plusieurs exemples illustrant avec émotion et pudeur les propos de l’auteure, il est certain que ce livre sera apprécié par les personnes se sentant désemparées face à la vieillesse et la douleur d’un animal. Il s’avérera également d’une grande aide pour les propriétaires d’animaux se demandant que faire avant, pendant et même après le décès lorsque le compagnon non humain a quitté la matière. Loin de tout pessimisme ambiant, je tiens à souligner combien ces pages sont empreintes d’une belle philosophie de vie et d’une spiritualité dégagée de toute religion. « Accompagner son animal en fin de vie » met à disposition des lecteurs un savoir-faire et un savoir-être dans la relation à l’animal en partance, basés sur un art du compromis entre action et lâcher prise face à l’inévitable mort.

A l’écart de toute prétention scientifique, et pourtant habitée par un esprit de recherche que j’apprécie particulièrement, l’auteure de ce bel ouvrage nous invite à concevoir l’accompagnement des animaux en fin de vie comme un art de la connexion, mais un art soumis à des règles précises. Les chapitres successifs abordent précisément les règles à observer lors de l’accompagnement d’un animal en fin de vie, également les pièges à éviter… Et ils sont nombreux !

Prenons trois règles majeures évoquées par l’auteure, valables pour le néophyte autant que pour l’interprète animalier confirmé : la première est d’avoir conscience de ses propres filtres et croyances avant toute communication animalière, la seconde consiste à ressentir que l’accompagnement d’un animal se fait principalement avec le cœur, la troisième, que la communication intuitive avec un animal se développe par la pratique, c’est-à-dire en fonction du temps que l’on y consacre. Autrement dit, il ne suffit pas de s’autoproclamer interprète animalier pour l’être, car certaines étapes doivent être validées par l’expérience.

Ce souci protocolaire, corrélé à l’esprit fécond du doute scientifique, est l’apanage des chercheurs et des enseignants, il est omniprésent chez Fabienne Maillefer. En effet, que l’on parle de connaissance empirique (médicale) ou intuitive de l’animal (CAI), il est toujours souhaitable de s’appuyer sur une méthode et des protocoles, car ce sont eux qui confèrent fiabilité et légitimité à une discipline. Cela étant dit, les méthodes et protocoles appliqués en sciences exactes, sciences humaines et sciences intuitives ne sauraient être les mêmes, étant donné que nous sommes en présence de trois expériences ou « terrains » différents (voire dimensions)… Mais ceci est un autre débat.

Un questionnement épistémologique (logique de la connaissance et constitution des connaissances) est en cours en CAI, je pense qu’il s’affinera et s’affirmera dans le temps, au moins sur deux questions : d’une part, quels critères retenir pour valider la connaissance intuitive en général et dans le cas de la communication avec les animaux en particulier. D’autre part, quel est le positionnement de la communauté des interprètes animaliers face aux multiples pratiques complémentaires (médecine vétérinaire, homéopathie, naturopathie, ostéopathie, lithothérapie, soins énergétiques, thérapie quantique, comportementalisme, éthologie, etc.)… Au fait, existe-t-il une communauté homogène des interprètes animaliers  ?

Compte tenu de son expérience, de son sens de la méthode, de son accueil des pratiques complémentaires, de son souci déontologique, de son aptitude pédagogique, puisqu’elle dirige déjà une école de formation à la CAI, il ne fait aucun doute que Fabienne Maillefer a son mot à dire et un rôle à tenir dans ce débat scientifique en cours et en devenir. Un tel débat permettra par ailleurs de repérer puis d’écarter les opportunistes ou les mythomanes squattant cette discipline, et dont les pronostics peuvent avoir des conséquences désastreuses sur le bien-être d’un animal, notamment lorsqu’ils conseillent ou déconseillent l’euthanasie en jouant les faux prophètes.

La CAI est une discipline naissante ayant ses « maîtres » à penser, ses théories, ses méthodes, ses enseignants et quelques écoles. Espérons que les prochaines décennies permettent à ceux et celles qui y consacrent leur vie d’obtenir une reconnaissance officielle et institutionnelle sans ambiguïté. Espérons et appelons de nos vœux l’ouverture de nombreuses chaires universitaires lui étant dédiée ainsi que le déploiement de son enseignement dans les cursus scolaires, chez les petits comme chez les grands. Espérons que la communication animale, encore marginale et rare dans les écoles vétérinaires, y prendra à l’avenir une place légitime et, plus généralement, dans tous les lieux où la vie et la mort des animaux sont présentes. Un long chemin reste à parcourir au vu de la lenteur des institutions et des habitudes collectives, mais l’ouvrage « Accompagner son animal en fin de vie » participe assurément de cet effort et de cette espérance.

 

Sylvie JOUBERT / www.sylvie-joubert.fr
Sociologue, auteure, 
Présidente de l’association « Fil de Conscience »  /  www.fildeconscience.fr


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